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La transidentité, passage de frontière entre les genres

Depuis une dizaine d'années, ce phénomène de société est de plus en plus visible. Mais savons-nous bien de quoi nous parlons lorsque nous évoquons la transidentité et les personnes transgenres ?

Nous allons tenter de définir précisément la notion, et d'en illustrer la réalité concrète grâce à deux interviews réalisées en 2022.

La transidentité est le fait, pour une personne transgenre, d'avoir une identité de genre différente du genre assigné à la naissance, contrairement à une personne cisgenre. Les termes « transsexuel » et « transsexualisme » sont des termes médicaux anciens, abandonnés par la plupart des médecins et fréquemment considérés comme pathologisants. Les femmes trans sont des femmes qui ont généralement été assignées hommes à la naissance. C'est l'inverse pour les hommes trans, tandis que les personnes non binaires ne s'identifient ni strictement homme, ni strictement femme, mais entre les deux, un mélange des deux, ou aucun des deux. (Source : Wikipedia)


La transidentité dans l'histoire

La transidentité est devenue, en 2017, un enjeu majeur dans la lutte contre les discriminations.

C'est en 1910 que le médecin Magnus Hirschfeld (1868-1935) décrit des personnes exprimant le sentiment que leur sexe anatomique ne correspond pas à celui auquel elles ont l’impression d’appartenir. Les avancées théoriques et médicales et les progrès de la chirurgie se combinent alors pour accompagner pleinement les avancées techniques du changement de sexe.

À partir des années 1990, et plus encore après les années 2000, naissent dans les pays occidentaux de nombreuses associations trans, militant en faveur de la reconnaissance juridique et du changement des mentalités. En parallèle, des évolutions juridiques sont enregistrées en faveur des droits des personnes trans. La France est condamnée en 1992 par la CEDH pour non-respect de la vie privée de la personne, puisqu’elle doit se justifier systématiquement de la différence entre son apparence et le sexe légal. La législation française est modifiée et élargit le droit au changement de sexe à l’état civil. La même année, la jurisprudence polonaise autorise des changements de sexe. En 1994, le juriste et activiste Stephen Whittle (né en 1955) réclame une loi reconnaissant les personnes trans : le Gender Recognition Act est voté en 2004. L’année précédente, l’Allemagne est, elle aussi, condamnée par le CEDH et fait évoluer son droit. L’Espagne et la Belgique suivent la même évolution, allégeant les parcours et les conditions d’obtention d’un nouvel état civil. Si certains pays sont lents à faire évoluer leur droit (Portugal, France), d’autres (Lettonie, Lituanie) ne proposent, en 2017, aucune disposition pour accompagner les demandes des personnes trans. (Source: EHNE)


 

Témoignage de Y, élève au lycée, et qui se définit plutôt comme non-binaire

Quand as-tu entendu parler de la transidentité pour la première fois ?

Y : Je pense que c'était au collège, mais je ne comprenais pas vraiment. Au début du confinement, j'ai fait des recherches et ai découvert des comptes Insta qui l'expliquaient super bien.

Comment as-tu découvert ta transidentité ?

Y : en me questionnant et en essayant.

Comment as-tu décidé de changer de prénom ?

Y : J'ai décidé de changer de prénom il y a plus d'un an, car mon prénom de naissance, trop féminin, me mettait mal à l'aise. Toutes les personnes trans et/ou non-binaires ne changent pas de prénom, mais c'est un choix que j'ai fait.

Ton identité de genre est-elle bien respectée par ton entourage ?

Y : Ça dépend énormément. Ma meilleure amie est ma plus grande alliée, elle m'a aidé.e des le début, avec ma famille c'est plus compliqué. Un an après mon coming out, ma mère a commencé à m’appeler par mon prénom choisi, et maintenant, elle essaye même de corriger les gens qui emploient mon deadname.

Est ce que tu te considères comme homosexuel ?

Y : Je m'identifie comme pansexuel.le, c'est- à-dire que je suis attiré.e par une personne et que je ne prends pas en compte son genre.

Comment ça se passe au lycée, est-ce que tout le monde l'accepte ?

Y : Au lycée, ça a été compliqué au début, d'autant que je ne savais pas par où commencer. J'ai dû apprendre à beaucoup de mes ami.e.s ce qu'est la non-binarité, et maintenant certaines écrivent même à l'inclusif. J'ai eu plus de mal avec les profs. À beaucoup j'ai dit être un homme trans pour qu'iels acceptent mon changement de prénom et de pronoms. Cependant, je suis non-binaire et mon expression de genre varie beaucoup. Du coup, de nombreuses personnes ne me prennent pas au sérieux.

Est ce qu'on parle de coming-out, ou c'est un autre terme ?

Y : On parle bien de coming out. "Coming out of the closet", en français "sortir du placard", est souvent associé à la communauté LGBTQIA+, et signifie annoncer qu'on fait partie de cette communauté. Le coming out est un moment effrayant et très angoissant.

As-tu déjà été victime de violences à cause de ta transidentité ?

Y : J'ai été victime de transphobie mais jamais d'agressions physiques, contraire-ment à beaucoup de mes adelphes*. (Le terme adelphe (du grec ancien ἀδελφός, adelphós, « de la même mère ») est un nom neutre qui peut être utilisé pour décrire le concept de frère/sœur de manière non genrée. Wikipedia)

Est ce qu'un jour tu penses à passer à la transition ?

Y : Je ne sais pas encore si je vais faire une transition médicale. Mais quelle que soit ma décision, je sais que toute personne trans est légitime : même sans traitement ou opération, un homme trans est un homme, une femme trans est une femme, et une personne non-binaire est non-binaire.


 

Témoignage de Mme X., mère de Jules (tous les noms ont été changés), vivant à Genève

Vous êtes la mère de Jules, 15 ans, adolescent transgenre. Est-ce que cette "description" vous dérange ?

Mme X : Absolument pas, car ce terme reflète la réalité.

Comment avez-vous vécu le coming out de votre fils ?

Mme X : Un matin, en partant pour l'école, Jules a collé sur sa porte une feuille avec le prénom "Jules" dessus. Sans avoir du tout vu cela venir, j'ai tout de suite compris le sens de ce message. Jules nous parlait souvent d'un de ses camarades de classe trans qui n'était absolument pas accepté par ses parents, ce qui me faisait beaucoup de peine. Ensuite, personnellement, je dois dire que j'ai eu de la peine avec le prénom choisi et que j'aurais aimé avec mon mari participer au choix de prénom. Mais Jules a un caractère bien trempé et il voulait ce prénom, tous ses amis ont tout de suite switché. A moi de m'adapter. Nous nous sommes mis d'accord pour un second prénom qui me plait énormément et qui reflète aussi son côté Slave.

Est-ce qu'à un moment donné vous vous êtes sentie responsable ou avez-vous eu peur d'être accusée d'avoir raté votre éducation ?

Mme X : Absolument pas. La transidentité est inhérente à la personne qui la vit et ce que ressent Jules lui appartient.

Avez-vous eu peur du regard des autres ?

Mme X : Je n'ai pas eu peur du regard des autres mais j'ai tout de même pris mon temps pour faire mon propre "coming out de parent d'enfant transgenre". Il y a encore beaucoup de personnes qui ne comprennent pas la transidentité et qui se limitent à des jugements pas toujours bienveillants ou qui pensent que c'est une mode Tik Tok. L'important pour moi est toujours de soutenir et protéger mon enfant.

Comment vos proches ont-ils réagi à ce coming out ?

Mme X : Dans l'ensemble je dois dire que nos proches ont réagi de façon très bienveillante et aidante. Quelques expressions d'incrédulité ici ou là, mais surtout beaucoup d'amour et de bienveillance. Le plus difficile a été pour ma mère, mais son amour pour Jules est bien présent et plus important que tout.

Comment, en tant que parents, accompagne-t-on un adolescent de 15 ans qui souhaite changer d'identité sexuelle ? L'avez-vous pris au sérieux ?

Mme X : Tout d'abord, plutôt que d'identité sexuelle, je parlerais d'identité de genre. C'est dans son genre féminin assigné à la naissance que Jules ne se reconnaît pas. Mon mari et moi avons tout de suite pris Jules au sérieux, même si nous n'avons pas immédiatement saisi l'ampleur de tout ce que cela impliquait/impliquerait à long terme. L'accompagnement se fait à plusieurs niveaux. La première chose a été d'adopter le nouveau prénom qu'Alix s'était choisi, ainsi que d'utiliser le bon pronom. Notre langue a souvent fourché les premiers mois, mais Jules ne nous en a pas tenu rigueur car il savait que nous ne le faisions pas par mauvaise volonté. Ensuite, je me suis renseignée plus sur la transidentité ainsi que sur les structures de support existantes à Genève. Assez rapidement, un soutien médical a été mis en place pour suivre Jules dans sa transition.

Vous êtes co-présidente d'une toute jeune association "Association Transparents Genève" pourquoi avoir ressenti le besoin de créer cette association ?

Mme X : Bien que Genève soit une ville ouverte à la transidentité, que des structures existent pour accueillir et suivre les jeunes trans, nous nous sommes rendu compte, entre parents concernés, qu'il manquait une structure constituée de parents et de personnes proches, qui pourrait être présente aussi dans la sphère publique pour porter la voix de nos enfants. Et que cela était nécessaire.

Quel message aimeriez-vous transmettre aux parents moins "ouverts" que vous ?

Mme X : Si vous aimez vos enfants, montrez-leur que votre amour est vraiment inconditionnel, et accompagnez-les de façon bienveillante. Votre enfant n'est pas responsable de ce qu'il ressent et a besoin de ses parents !



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